L’idée du corps diplomatique n’était pas dénuée de raison. Que risquaient-ils à prendre seulement cinq de ces Terriens à bord de leur vaisseau et à repartir aussitôt ? C’était bien sûr une attitude vaguement cavalière, mais ils n’avaient pas vraiment le temps de tout expliquer avant d’agir. Ils le prendraient plus tard, leurs diplomates savaient mettre de la gelée d’épinards dans leurs propos, histoire d’adoucir les faits.
Malgré les protestations qui se firent entendre du côté militaire, le commandant Gart prit le parti des scientifiques. Les Terriens seraient donc téléportés à bord du Eultha’dferay ; aussitôt après, les Galaciens quitteraient le système et continueraient leur route pendant qu’ils se renseigneraient sur les capacités de ces étranges créatures.
Que risquaient-ils ?
L’équipage compétent, autrement dit les scientifiques et Balla – allez, disons Balla – mirent au point la procédure complète, du repérage précis des messagers de l’Académie des Etoiles, à leur fuite dans l’hyperespace jusqu’au système suivant. Pendant ce temps, les diplomates préparaient le discours d’accueil – que Balla traduisit par la suite – pour leurs nouveaux hôtes tandis que les militaires faisaient l’inventaire de leurs forces et de leurs armes. Il fallait qu’ils soient prêts à toute éventualité.
Puis vint la nouvelle, annoncée à tous par Balla : les cinq Terriens de l’Académie des Etoiles avaient enfin été repérés avec précision. L’opération de récupération allait donc pouvoir commencer.
Pour ce faire et afin d’éviter tout décalage temporel, le Eultha’dferay se devait d’être le plus proche possible de la Terre – non mais, décidément quel drôle de nom pour une planète majoritairement constituée d’eau. Dans la salle de contrôle et les autres points d’observation, ce fut rapidement l’affluence. Gagnés par la curiosité, tous les Galaciens qui n’avaient rien à faire étaient là.
Sur le pied de guerre et postés dans toutes les coursives, salles et points d’observation, les militaires suivaient de leur côté les opérations de très près : ils ne devaient pas se faire repérer. Selon les ordres et les arrangements passés avec les deux autres castes, ils avaient le pouvoir de faire changer de cap le vaisseau afin de s’enfuir dans la faille interdimensionnelle déjà prête. Ils pouvaient même enrôlé temporairement tous les Galaciens. Toujours selon les arrangements – très longuement discutés –, l’opération ne devait pas prendre plus de huit minutes trente-deux secondes, dernier délai.
Tandis qu’ils se rapprochaient lentement de la petite planète bleue à une vitesse à peine inférieure à celle de la lumière, Balla tentait de ne pas perdre le signal et d’affiner les coordonnées sans cesse recalculées. Son algorithme de calcul très complexe prenait même en compte la gestion d’événements probables, ce qui devait lui permettre d’anticiper de nouvelles coordonnées et de réduire au mieux la zone à récupérer. Un travail de longue haleine que les Galaciens ne pouvaient pas comprendre. Elle était le seul être à bord capable de faire ça, et en plus elle devait maintenir la faille interdimensionnelle ouverte. Mais enfin, c’était ainsi.
Le commandant Gart, accompagné d’une délégation de chaque caste, suivait tout cela depuis l’aire de téléportation. Ici même allait être récupérée toute la zone dans laquelle se trouvaient les cinq Terriens.
Il n’y avait pas de protocole clairement défini pour ce genre d’événements, mais ils avaient toujours procédé de la même façon : les parlementaires prenaient la parole les premiers et souhaitaient la bienvenue tout en indiquant qu’ils étaient là en paix. Si tout se passait bien, ils introduisaient ensuite le commandant Gart, toujours sous bonne escorte militaire.
La tension montait dans le vaisseau tandis que l’instant approchait. Partout où il y avait rassemblement, des hologrammes diffusaient le déroulement des opérations. C’est-à-dire qu’en cet instant précis, ils diffusaient à nouveau le message venu de la Terre, et certains Galaciens, malgré le stress, commençaient à taper du pied voire se déhanchaient bizarrement.
Balla prit soudain la parole :
— Tout est prêt pour la récupération.
Le commandant prit une longue inspiration :
— Lieutenant Nork ?
— Dans deux minutes dix-huit secondes, on part de toutes façons ! répondit le militaire, l’œil rivé sur un chronomètre.
— Madame Burn ?
— Nous sommes parés à les recevoir, commandant. Nous sommes impatients de saluer cette nouvelle communauté, ce peuple jusqu’alors inconnu. Au nom de Galacia, nous…
— Un « oui » aurait suffit, Madame Burn.
— Je vous prie de bien vouloir m’excuser, commandant.
Ce dernier leva les yeux et se tourna vers les scientifiques.
— Monsieur Spake ?
— Tout est en phase. Nous pouvons procéder à la téléportation, commandant.
— Récupération en cours, intervint l’intelligence artificielle.
Pour effectuer l’opération, Balla mit sourdine les hologrammes et enclencha les micros de l’aire de téléportation. Sur les images, les Terriens continuaient de bouger avec leur étrange rythme, continuant de s’exprimer sans se douter de rien.
Il y eut quelques secondes d’attente pendant lesquelles un sifflement monta dans les aigus.
Puis une distorsion gonfla sur l’aire de téléportation, cependant que les images reçues de la Terre grouillait de parasites.
Et enfin, ils apparurent, tous les cinq, en entier – plusieurs essais avaient déjà donné des résultats désastreux, la faute à des erreurs de calcul diverses telles que la gravité ou le champ magnétique –, alors que les images envoyées depuis la Terre venaient de se débarrasser de ses parasites.
Mais c’était comme si le son s’était perdu quelque part dans le transfert : ils étaient bien là et ils gesticulaient toujours autant, ouvrant et refermant la bouche en rythme, mais rien n’en sortait. Le son était resté sur place.
Le commandant Gart jeta un œil au porte-parole des scientifiques. Celui-ci leva les orteils.
— Je ne sais pas, dit-il.
— Ah cette fois, ce n’est pas ma faute, jeta Balla qui se sentait visée.
Dans le studio de l’émission, les spectateurs restèrent médusés. Les cinq restants étaient là l’instant d’avant, puis ils avaient disparu sans laisser de traces, oubliant leur musique ici.
A la régie, on chercha sur toutes les caméras. Ils n’avaient pas pu disparaître comme ça, tout de même.
— Coupez le playback ! cria le directeur.
Il fallait en effet agir vite, avant que les fans ne se rendent compte de la supercherie.
Puis il demanda au présentateur de l’émission, par le biais de son oreillette, de prendre la parole.
— Mais qu’est-ce que je dis ?
— Bin, tu te débrouilles, je ne sais pas moi. T’as qu’à faire chanter quelqu’un d’autre. Le spectacle continue, rien ne peut l’arrêter. On va essayer de les retrouver.
Malgré les protestations qui se firent entendre du côté militaire, le commandant Gart prit le parti des scientifiques. Les Terriens seraient donc téléportés à bord du Eultha’dferay ; aussitôt après, les Galaciens quitteraient le système et continueraient leur route pendant qu’ils se renseigneraient sur les capacités de ces étranges créatures.
Que risquaient-ils ?
L’équipage compétent, autrement dit les scientifiques et Balla – allez, disons Balla – mirent au point la procédure complète, du repérage précis des messagers de l’Académie des Etoiles, à leur fuite dans l’hyperespace jusqu’au système suivant. Pendant ce temps, les diplomates préparaient le discours d’accueil – que Balla traduisit par la suite – pour leurs nouveaux hôtes tandis que les militaires faisaient l’inventaire de leurs forces et de leurs armes. Il fallait qu’ils soient prêts à toute éventualité.
Puis vint la nouvelle, annoncée à tous par Balla : les cinq Terriens de l’Académie des Etoiles avaient enfin été repérés avec précision. L’opération de récupération allait donc pouvoir commencer.
Pour ce faire et afin d’éviter tout décalage temporel, le Eultha’dferay se devait d’être le plus proche possible de la Terre – non mais, décidément quel drôle de nom pour une planète majoritairement constituée d’eau. Dans la salle de contrôle et les autres points d’observation, ce fut rapidement l’affluence. Gagnés par la curiosité, tous les Galaciens qui n’avaient rien à faire étaient là.
Sur le pied de guerre et postés dans toutes les coursives, salles et points d’observation, les militaires suivaient de leur côté les opérations de très près : ils ne devaient pas se faire repérer. Selon les ordres et les arrangements passés avec les deux autres castes, ils avaient le pouvoir de faire changer de cap le vaisseau afin de s’enfuir dans la faille interdimensionnelle déjà prête. Ils pouvaient même enrôlé temporairement tous les Galaciens. Toujours selon les arrangements – très longuement discutés –, l’opération ne devait pas prendre plus de huit minutes trente-deux secondes, dernier délai.
Tandis qu’ils se rapprochaient lentement de la petite planète bleue à une vitesse à peine inférieure à celle de la lumière, Balla tentait de ne pas perdre le signal et d’affiner les coordonnées sans cesse recalculées. Son algorithme de calcul très complexe prenait même en compte la gestion d’événements probables, ce qui devait lui permettre d’anticiper de nouvelles coordonnées et de réduire au mieux la zone à récupérer. Un travail de longue haleine que les Galaciens ne pouvaient pas comprendre. Elle était le seul être à bord capable de faire ça, et en plus elle devait maintenir la faille interdimensionnelle ouverte. Mais enfin, c’était ainsi.
Le commandant Gart, accompagné d’une délégation de chaque caste, suivait tout cela depuis l’aire de téléportation. Ici même allait être récupérée toute la zone dans laquelle se trouvaient les cinq Terriens.
Il n’y avait pas de protocole clairement défini pour ce genre d’événements, mais ils avaient toujours procédé de la même façon : les parlementaires prenaient la parole les premiers et souhaitaient la bienvenue tout en indiquant qu’ils étaient là en paix. Si tout se passait bien, ils introduisaient ensuite le commandant Gart, toujours sous bonne escorte militaire.
La tension montait dans le vaisseau tandis que l’instant approchait. Partout où il y avait rassemblement, des hologrammes diffusaient le déroulement des opérations. C’est-à-dire qu’en cet instant précis, ils diffusaient à nouveau le message venu de la Terre, et certains Galaciens, malgré le stress, commençaient à taper du pied voire se déhanchaient bizarrement.
Balla prit soudain la parole :
— Tout est prêt pour la récupération.
Le commandant prit une longue inspiration :
— Lieutenant Nork ?
— Dans deux minutes dix-huit secondes, on part de toutes façons ! répondit le militaire, l’œil rivé sur un chronomètre.
— Madame Burn ?
— Nous sommes parés à les recevoir, commandant. Nous sommes impatients de saluer cette nouvelle communauté, ce peuple jusqu’alors inconnu. Au nom de Galacia, nous…
— Un « oui » aurait suffit, Madame Burn.
— Je vous prie de bien vouloir m’excuser, commandant.
Ce dernier leva les yeux et se tourna vers les scientifiques.
— Monsieur Spake ?
— Tout est en phase. Nous pouvons procéder à la téléportation, commandant.
— Récupération en cours, intervint l’intelligence artificielle.
Pour effectuer l’opération, Balla mit sourdine les hologrammes et enclencha les micros de l’aire de téléportation. Sur les images, les Terriens continuaient de bouger avec leur étrange rythme, continuant de s’exprimer sans se douter de rien.
Il y eut quelques secondes d’attente pendant lesquelles un sifflement monta dans les aigus.
Puis une distorsion gonfla sur l’aire de téléportation, cependant que les images reçues de la Terre grouillait de parasites.
Et enfin, ils apparurent, tous les cinq, en entier – plusieurs essais avaient déjà donné des résultats désastreux, la faute à des erreurs de calcul diverses telles que la gravité ou le champ magnétique –, alors que les images envoyées depuis la Terre venaient de se débarrasser de ses parasites.
Mais c’était comme si le son s’était perdu quelque part dans le transfert : ils étaient bien là et ils gesticulaient toujours autant, ouvrant et refermant la bouche en rythme, mais rien n’en sortait. Le son était resté sur place.
Le commandant Gart jeta un œil au porte-parole des scientifiques. Celui-ci leva les orteils.
— Je ne sais pas, dit-il.
— Ah cette fois, ce n’est pas ma faute, jeta Balla qui se sentait visée.
Dans le studio de l’émission, les spectateurs restèrent médusés. Les cinq restants étaient là l’instant d’avant, puis ils avaient disparu sans laisser de traces, oubliant leur musique ici.
A la régie, on chercha sur toutes les caméras. Ils n’avaient pas pu disparaître comme ça, tout de même.
— Coupez le playback ! cria le directeur.
Il fallait en effet agir vite, avant que les fans ne se rendent compte de la supercherie.
Puis il demanda au présentateur de l’émission, par le biais de son oreillette, de prendre la parole.
— Mais qu’est-ce que je dis ?
— Bin, tu te débrouilles, je ne sais pas moi. T’as qu’à faire chanter quelqu’un d’autre. Le spectacle continue, rien ne peut l’arrêter. On va essayer de les retrouver.