Bon voyage

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vendredi 30 mai 2008

Episode 5: Je ne suis pas un héros, mais c’est pas grave

Il ne fallut que quelques heures au super ordinateur Balla pour traduire – tout seul – le message envoyé depuis la planète bleue. Pour ce faire, il avait analysé nombre de signaux émis depuis cette même planète, étudiant la syntaxe et la structure et les comparant à tous les langages qu’il connaissait. Et tout cela, Balla l’avait fait sans aucune aide, quoi qu’on en dît.
Le commandant Gart se prélassait dans la salle panoramique quand on le prévint de l’avancement des choses via l’intercom.
Difficile d’être tranquille ces derniers temps avec toute cette histoire autour d’une réponse si rapide.
Mais c’était son rôle que d’être présent pour ce genre de choses. Aussi, se rendit-il à la salle de réunion…
Où il trouva tous ses compatriotes, aussi bien les militaires que les scientifiques – les parlementaires suivant le mouvement – en train de gesticuler et de fredonner ce langage qu’il avait déjà eu l’occasion d’entendre un peu plus tôt.
Il fallut à tout ce petit monde un moment avant de se rendre compte que le commandant avait fait irruption dans la salle de réunion. Pour être plus précis, il fallut que ce dernier fît acte de sa présence en criant son autorité.
— Qu’est-ce que tout cela veut dire ? cria-t-il encore lorsqu’il fut sûr que tous lui prêtaient attention.
Poussé en avant par tous les autres, ce fut la porte parole de la caste des parlementaires, Madame Burn, qui se porta volontaire pour expliquer tout cela au commandant de bord.
— Nous avons… Balla a réussi à traduire le message.
— Ah ! J’ai cru, fit la voix de ce dernier.
— Je sais. C’est pour cela que je suis venu. Mais je ne comprends pas pourquoi vous êtes dans cet état.
— Parce que ça balance ! répondit Burn avec entrain tout en interprétant un étrange pas qui la déséquilibra, certainement à cause du mouvement de hanche qui l’accompagna. Wooh !
Derrière son interlocutrice, le commandant vit certains occupants de la salle reprendre le même élan.
— Que les choses soient bien claires, s’emporta-t-il, le prochain que je vois se trémousser de la sorte, je le condamne à la tonte de la plante des pieds.
Dans le grand espace de la salle chacun retint sa respiration dans un hoquet, des museaux frémirent et des poils se hérissèrent sur les épaules. Condamnation la plus déshonorante chez les Galaciens, le commandant n’avait eu recours à la tonte de la voûte plantaire qu’à deux reprises depuis le début de leur voyage, mais il sentait une soudaine envie de remettre cela au goût du jour ; il y avait tout de même des façons de se tenir devant le commandant du Eultha'dferay.
— Je vois qu’on se comprend. Si maintenant on pouvait regarder ce message.
— Bien sûr, commandant, s’empressa de répondre la porte-parole avant de se retourner vers l’écran holographique. Balla, si tu veux bien ?
— Mais bien sûr.
La lumière diminua aussitôt dans la salle et l’image envahit l’écran. Le message se déroula alors entièrement et dans la salle c’était la consternation lorsque la lumière. Tous les Galaciens se regardèrent en levant les orteils.
— Je ne comprends pas, dit soudain le commandant Gart. Il manquait quelque chose, non ?
Spake, le porte-parole des scientifiques chuchota alors qu’il n’y avait pas de son, que c’était peut-être un simple oubli, pas bien grave bien que légèrement gênant.
— Ah bin si on ne peut plus oublier un petit truc de temps en temps ! s’emporta Balla. Ca va ! Excusez-moi d’être occupé à tout faire pour que toutes les parties vitales du vaisseau continuent de bien fonctionner ! Le voilà votre message !
La lumière diminua à nouveau et le message apparut, le son était bien plus fort qu’il ne l’aurait dû, mais, et même si tous les Galaciens présents esquissaient un drôle de rictus de douleur, il était là cette fois.
Il y avait toujours ce bruit de fond, composante étrange du langage qui ne semblait pas avoir pu être traduite. Puis les paroles arrivèrent tandis que les cinq créatures se déchaînaient sur l’écran :
— Je n'suis pas un héros. Mes faux pas me collent à la peau. Je n'suis pas un héros. Faut pas croire ce que disent les journaux. Je n'suis pas un héros. Un héros
— Qu’est-ce que ça veut dire ? demanda le commandant.
— C’est pourtant simple, répondit le lieutenant Nork : ils ne sont pas des héros. On n’a plus rien à faire ici.
— Non, vous n’y êtes pas, s’opposa un scientifique. Vous ne vous rendez pas compte à quel point les Terriens sont évolués.
— Les quoi ?
— Les Terriens. Ah oui, on a découvert que les habitants appelaient cette planète la Terre.
— La Terre ? Comme la terre ?
— Oui.
— Pourquoi ? La terre est bleue sur leur planète ?
— Non, c’est l’eau.
— Alors, pourquoi… (Le commandant ferma les yeux en prenant une profonde inspiration.) Laissez tomber. Donc, on ne se rendait pas compte à quel point ils étaient évolués.
— Oui et tellement évoluée qu’ils font même de la « musique ».
— De la quoi ?
— « Musique. » Le bruit de fond. D’après nos recherches, ils appellent ça de la « musique ». Ca leur sert de moyen de communication à un niveau que nous ne connaissons pas. Et il faut avouer que ça balance. Wooh !
— Monsieur Spake !
— Désolé, commandant. Toujours est-il qu’une race aussi avancée ne peut que jouer sur les mots et utiliser les double sens à foison.
— Ce qui veut dire ?
— Ca veut rien dire du tout ! clama un militaire.
— Je voudrais connaître l’avis de tout le monde.
— Eh bien, reprit le scientifique, ça veut dire que s’ils disent qu’ils ne sont pas des héros, c’est justement parce qu’ils le sont. C’est un double sens dont la hauteur n’a d’égal que leur modestie. En plus, d’après le logo, ils semblent appartenir à l’Académie des Etoiles. C’est de bon augure.
— Et que suggérez-vous ?
— Ils nous aideront, commandant.
— Commandant, c’est n’importe quoi !
— Oui, lieutenant Nork ?
— Ils l’ont dit : ce ne sont pas des héros. Allons-nous-en, commandant, et finissons-en avec cette plaisanterie. Nous n’avons pas le temps et nous en avons déjà trop perdu.
Et c’était pareil chaque fois qu’ils étaient confrontés à une décision, pas facile dans ces conditions. Heureusement, les parlementaires étaient là et le commandant Gart savait qu’ils allaient bientôt prendre la parole pour trouver une solution qui contenterait les deux camps.
Il garda donc le silence quelques instants tandis que les représentants des deux castes se disputaient. Quand Burn s’approcha de lui.
— Je crois que nous pourrions embarquer ceux-ci et continuer notre voyage. S’ils peuvent nous aider, nous repasserons par ici. Sinon tant pis, ils ne sont que cinq.

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